Enfant d'un territoire rural, j'ai développé très tôt une fascination pour le feu qui m'a naturellement guidé vers la céramique.

Ce dialogue créatif exige l'humilité du paysan face au climat – je prépare méticuleusement le terrain, mais c'est la flamme qui décide du résultat final.

J'enfourne des structures rigoureusement construites, puis les flammes, léchant inégalement les pièces, révèlent des transformations impossibles à calculer. La cuisson devient l'événement créatif central, métamorphosant la porcelaine et la géométrie en formes déformées, affaissées, marquées par le passage du feu.

Je construis avec précision ce que le feu décidera de déconstruire - mes sculptures céramiques sont le témoignage d'une négociation intense entre contrôle et abandon.

Cette fragilité guide ma transposition d'éléments industriels en céramique, matériau imprévisible à haute température.


Après les Beaux-Arts de Lyon et ma formation au CNIFOP, mes résidences artistiques ont profondément façonné ma relation aux territoires et aux matières. La Puisaye m'a transmis l'importance des savoir-faire anciens et du rapport au feu. Limoges m'a confronté aux technologies céramiques industrielles, tandis que le musée Keramis m'a permis d'explorer les dimensions monumentales de mon travail.

Cette traversée des lieux et des techniques nourrit ma pratique actuelle où j'utilise délibérément les matériaux locaux comme fondation politique et écologique de mes projets, tout en intégrant les technologies numériques contemporaines.

Cette confrontation entre tradition et innovation définit ma position dans le champ céramique contemporain. Ma démarche réunit l'anachronisme technique et l'écologie dans une même recherche matérielle. En transformant des formes industrielles familières, j’interroge nos paradoxes collectifs et questionne notre relation aux structures qui nous entourent.

Là où l'industrie fabrique l'illusion de permanence, mes pièces capturent ce moment précis où la rigidité cède à la gravité - elles sont l'écho céramique d'un monde qui, malgré ses architectures ambitieuses, reste fondamentalement vulnérable.